Triduum du Salut.



Un proverbe Hongrois dit : « Toute merveille dure trois jours. » Et un proverbe Chinois ajoute : « Hier, aujourd'hui et demain, ce sont les trois jours de l'homme. »

Le mystère de notre salut, comme une scène théâtrale se joue sur trois jours : Jeudi Saint, Vendredi Saint et Pâques. Ce sont trois jours qui donnent sens à toute la vie chrétienne. Ce sont les mystérieux trois jours de notre foi.

Dans la nuit du Jeudi saint, le Seigneur s'est donné à ses disciples sous le Pain Eucharistique, espèce de sa vraie présence toujours active dans l'Église et dans les fidèles. Le Vendredi Saint, dans l'ultime sacrifice de la Croix, le Seigneur a accompli toutes les prophéties qui le concernent. Il a donné sa vie pour que les pécheurs vivent. Et enfin, le jour solennel de la Résurrection, il a été ramené à la vie, signe de notre future Résurrection. Sa victoire sur la mort prélude à nos victoires individuelles et personnelles sur le péché qui nous mène à la mort, tant spirituelle que physique. Nous célébrons les trois jours de notre existence quotidienne, notre passé en tant que pécheurs condamnés à mort, notre présent en tant que sauvés dans le sang et la mort du Seigneur, et notre avenir (futur) dans la gloire de Dieu, lorsque nous ressusciterons avec lui.

Nous allons, dans cette méditation de ce Triduum rappeler à l'esprit le mystère de notre foi : le Christ est mort, le Christ est ressuscité, le Christ reviendra...

Le Triduum Pascal commence avec cette messe de ce soir, la Cène du Seigneur, qui est amplifiée par la célébration du Vendredi Saint, centrée sur la Croix, atteint son apogée avec la Veillée pascale et se termine avec le Dimanche de Pâques.

 

Pour les Lectures, Cf. https://www.aelf.org/2022-04-14/romain/messe 

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A. JEUDI SAINT : LE CHRIST POUR NOTRE VIE : le Pain de Vie.

 

« Ainsi donc, chaque fois que vous mangez ce pain et que vous buvez cette coupe, vous proclamez la mort du Seigneur, jusqu’à ce qu’il vienne. » (1 Co 11,26)

Un proverbe Portugais dit : « Dans une maison sans pain, tout le monde se plaint et personne n'a raison. » Et un proverbe Britannique ajoute : « Le pain est l’outil de la vie, mais la bière est la vie elle-même. »

La Sainte Eucharistie est au centre de la célébration de ce soir. En elle, le Seigneur notre Dieu, avant de monter sur le bois de la Croix pour son sacrifice singulier et inégal, s'est donné comme le pain de notre vie, le pain de notre cheminement spirituel.

« En célébrant la dernière Cène avec ses apôtres au cours du repas pascal, Jésus a donné son sens définitif à la pâque juive. En effet, le passage de Jésus à son Père par sa mort et sa résurrection, la Pâque nouvelle, est anticipée dans la Cène et célébrée dans l’Eucharistie qui accomplit la pâque juive et anticipe la pâque finale de l’Église dans la gloire du Royaume. "Faites ceci en mémoire de moi" » CEC 1340. Et c'est justement ce que nous faisons à chaque célébration eucharistique, et plus particulièrement ce soir, mémorial de la Cène du Seigneur.

Dans la célébration eucharistique de ce soir, un autre élément de la méditation est le rite du lavement des pieds, l'acte d'humilité du Seigneur. La Collecte de cette célébration est en elle-même un beau résumé de ce que nous vivons : nous sommes appelés par Dieu à participer à très sainte Cène où son Fils unique, avant de se livrer lui-même à la mort, a voulu remettre à son Église le sacrifice nouveau de l’Alliance éternelle, banquet de son amour.

Dans la première lecture, l'Eucharistie est décrite comme la nourriture du voyage. A travers le repas pascal des fils d'Israël en Egypte, le Seigneur vient cheminer avec nous dans les voyages de notre existence quotidienne. Il est l'Agneau dont le sang nous a sauvés du péché et de la mort imminente. Dans le sang que Jésus versera sur la Croix, nous recevons un signe, une protection contre le fléau du péché.

Nous sommes jour après jour appelés à participer au sacrifice du Seigneur et à devenir des signes de son amour pour les autres. Aussi souvent que nous venons à la messe et que nous prenons le pain eucharistique, nous dit Paul, nous actualisons son sacrifice, nous proclamons sa mort jusqu'à ce qu'il revienne dans la gloire.

Le sacrifice du Seigneur prend tout son sens quand on le comprend comme sacrifice d'amour et d'humilité. C'est ce que dit l'apôtre Jean dans l'Evangile. « Jésus, ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, les aima jusqu’au bout... » Cet amour jusqu’au bout, le Seigneur l'a manifesté par le lavement des pieds et l'institution de l'Eucharistie.

Nous sommes invités à considérer l'humilité authentique comme le plus grand acte d'amour. Notre premier acte d'humilité est envers Dieu. Ainsi, quand nous nous sommes rabaissés devant Dieu, nous pouvons montrer son amour aux autres en nous humiliant devant eux, en les estimant mieux et en leur donnant le meilleur de nous-mêmes. C'est exactement ce que le Seigneur a fait tout au long de sa vie. Il a recherché en tout, la volonté de son Père, et comme cette volonté du Père était de le conduire à la plus grande expression d'humilité par la mort humiliante sur la croix, il s'est aussi rabaissé pour laver les pieds de ses disciples. Le Seigneur leur dit alors : « Comprenez-vous ce que je viens de faire pour vous ? Vous m’appelez “Maître” et “Seigneur”, et vous avez raison, car vraiment je le suis. Si donc moi, le Seigneur et le Maître, je vous ai lavé les pieds, vous aussi, vous devez vous laver les pieds les uns aux autres. C’est un exemple que je vous ai donné afin que vous fassiez, vous aussi, comme j’ai fait pour vous. »

L'humilité devient ici un modèle de vie, d'obéissance et de véritable vie de disciple. Nous ne pouvons pas clamer notre appartenance au Seigneur si nous ne sommes pas capables de nous humilier et de laver les pieds des autres, c'est-à-dire de nous mettre à leur service. L'humilité est le sacrement du service, tout comme l'Eucharistie est le sacrement de l'amour. Dans ce triduum pascal, puissions-nous apprendre du Seigneur à aimer et à servir nos frères et sœurs comme le Seigneur nous a aimés et servis.

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B. VENDREDI SAINT : Blessé par Obéissance.

 

« Maltraité, il s’humilie, il n’ouvre pas la bouche… » (Isaïe 53,7)

Un proverbe Sicilien dit : « Une tête blessée peut être soignée et guérit, mais un cœur blessé ne guérit jamais. » Et un proverbe Danois ajoute : « Une blessure ne guérit jamais si bien qu'on ne puisse voir la cicatrice. »

Ce jour d’aujourd’hui et le jour suivant, selon une tradition très ancienne, l'Église ne célèbre pas du tout les Sacrements, à l'exception de la Pénitence et de l'Onction des Malades. L'auteur de tous les Sacrements, leur instituant, et celui que nous célébrons et recevons par les Sacrements est sur le point de mourir pour nos péchés. Il s'est fait victime d'expiation pour que les pécheurs soient pardonnés et vivent.

Nous célébrons aujourd'hui la miséricorde de Dieu, son plus grand amour pour nous. Nous cheminons avec l'Homme de Douleurs, le Roi de Gloire, sur le chemin comme le peuple de la croix, portant nos croix avec lui.

Comme on peut le voir dans les décors liturgiques, pas de chants, pas d'hymnes, pas de revêtements sur l'autel, pas de cierges... rien, signe du vide qui va régner, signe aussi de notre néant. Nous ne sommes que des pécheurs. Néanmoins, Dieu nous aime dans ce néant qui est le nôtre et meurt pour nous.

« C’est "l’amour jusqu’à la fin" (Jn 13, 1) qui confère sa valeur de rédemption et de réparation, d’expiation et de satisfaction au sacrifice du Christ. Il nous a tous connus et aimés dans l’offrande de sa vie (cf. Ga 2, 20 ; Ep 5, 2. 25). "L’amour du Christ nous presse, à la pensée que, si un seul est mort pour tous, alors tous sont morts" (2 Co 5, 14). Aucun homme, fût-il le plus saint, n’était en mesure de prendre sur lui les péchés de tous les hommes et de s’offrir en sacrifice pour tous. L’existence dans le Christ de la Personne divine du Fils, qui dépasse et, en même temps, embrasse toutes les personnes humaines, et qui le constitue Tête de toute l’humanité, rend possible son sacrifice rédempteur pour tous. » CEC 616

Dans la première lecture, nous sommes amenés à méditer sur le quatrième chant du Serviteur du Seigneur. Isaïe nous dit que notre salut vient de ses blessures. « C’est à cause de nos fautes qu’il a été broyé. » Ces chants du Serviteur Souffrant sont une annonce de la passion, de la mort et de la résurrection du Christ. L'auteur de la lettre aux Hébreux voit dans cette passion du Christ un acte d'obéissance. Il nous dit qu'en souffrant et en mourant sur la Croix, le Seigneur a appris l'obéissance et est ainsi devenu la source du salut éternel pour nous qui croyons et lui obéissons. Si Jésus a appris l'obéissance à travers la souffrance, en tant que ses disciples, nous devons également affronter notre souffrance quotidienne comme une contribution à ses souffrances et obéir à la volonté de Dieu quoi qu'il en coûte.

Dans le récit que Jean donne de la Passion du Seigneur, il nous est donné de voir à quel point étaient profondes les souffrances qu'il endura docilement pour notre salut. Il n'y a pas d'autre mot qui pourrait qualifier l'événement du Vendredi Saint, si ce n'est l'amour. Nous célébrons l'amour passionné et sacrificiel de Dieu pour notre humanité. Et la dernière parole du Seigneur, en mourant sur la Croix, exprime cet amour : « J'ai soif ». Le Seigneur est éprouvé et torturé par la soif. Il a soif de voir notre humanité découvrir le vrai sens de l'amour, Agape, l'amour désintéressé, non pas l’Eros. Il a soif que le Royaume qu'il est venu instaurer se réalise dans nos cœurs et dans ce monde. Il a soif que les hommes deviennent des instruments de paix.

Et tandis que tout semble s'accomplir pour lui, alors qu'il semble avoir bu la coupe du chagrin et de l'humiliation jusqu'à la dernière goutte, tout commence maintenant pour vous et moi. Par sa mort, Jésus a ouvert une nouvelle ère, une nouvelle aube de vie pour nous, de nouveaux jours dans l'histoire humaine. C'est l'ère de la Nouvelle Alliance de Dieu avec notre humanité. Maintenant est venu le temps pour nous de marcher sur les traces du Seigneur, portant nos croix, aimant comme nous sommes aimés, et endurant patiemment l'amour et ce qu'il en coûte tout en obéissant à la volonté de Dieu. La Passion du Christ ouvre la voie à notre passion humaine.

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C. SAMEDI SAINT : Le Samedi de Gloire.

 

« Nous avons été mis au tombeau avec lui, c’est pour que nous menions une vie nouvelle, nous aussi, comme le Christ qui, par la toute-puissance du Père… » (Romains 6,4)

Un proverbe Philippin dit : « Il n'y a pas de gloire sans sacrifice. » Et un proverbe Latin ajoute : « Si la gloire vient après la mort, je ne suis pas pressé. »

Du tombeau au trône de gloire. Du chagrin au grand Hallelujah. Ce soir, notre Sauveur est victorieux de la mort. Une nouvelle lumière jaillit des ténèbres et des vallées douloureuses de ce monde. Le Seigneur est ressuscité, alléluia.

Cette nuit est unique. C'est la nuit de notre rédemption. La nuit de la récréation par Dieu. Le Catéchisme s'étend sur la singularité de cette nuit en disant : « "O nuit, chante l’‘Exsultet’ de Pâques, toi seule as pu connaître le moment où le Christ est sorti vivant du séjour des morts" (MR, Vigile Pascale). En effet, personne n’a été le témoin oculaire de l’événement même de la Résurrection et aucun évangéliste ne le décrit. Personne n’a pu dire comment elle s’était faite physiquement. Moins encore son essence la plus intime, le passage à une autre vie, fut perceptible aux sens. Événement historique constatable par le signe du tombeau vide et par la réalité des rencontres des apôtres avec le Christ ressuscité, la Résurrection n’en demeure pas moins, en ce qu’elle transcende et dépasse l’histoire, au cœur du mystère de la foi. C’est pourquoi le Christ ressuscité ne se manifeste pas au monde (cf. Jn 14, 22) mais à ses disciples, "à ceux qui étaient montés avec lui de Galilée à Jérusalem, ceux-là mêmes qui sont maintenant ses témoins auprès du peuple" (Ac 13, 31). » CEC 647.

Toutes les lectures qui sont données pour notre méditation chantent la création, la vie, la récréation, la régénération et la rédemption. Nous devons chanter aujourd'hui notre chant de rédemption. Nous sommes appelés à nous émanciper de l'esclavage du péché, à libérer notre esprit et notre vie du péché et à embrasser la vie juste que le Seigneur inaugure aujourd'hui...

Dans cette Veillée, la Mère de toutes les Veillées, neuf lectures sont proposées, à savoir sept de l'Ancien Testament et deux du Nouveau... Ce sont tous des chants de vie nouvelle, de lumière nouvelle, d'aube nouvelle... En méditant sur ces lectures, mais aussi en repensant aux événements qui se sont déroulés le Vendredi Saint, les paroles de cette chanson prophétique de Bob Marley résonnent de plus en plus dans mon cœur... "Redemption Song" (Hymne de Rédemption). Pourrions-nous la chanter ensemble et penser à ce que nous vivons ce soir...

« Old pirates, yes, they rob I. Sold I to the merchant ships. Minutes after they took I, from the bottomless pit. But my hand was made strong, by the hand of the Almighty. We forward in this generation triumphantly. Won't you help to sing. These songs of freedom? 'Cause all I ever have, Redemption songs. Redemption songs.

Emancipate yourselves from mental slavery, none but ourselves can free our minds. Have no fear for atomic energy, 'cause none of them can stop the time. How long shall they kill our prophets, while we stand aside and look? Ooh! Some say it's just a part of it, we've got to fulfill the book. Won't you help to sing. These songs of freedom? 'Cause all I ever have, Redemption songs, Redemption songs, Redemption songs. »

Oui, le péché est en fait le vrai vieux pirate qui nous vole. Il vole notre liberté et nous vend au navire marchand de la mort. Dans le péché, nous sommes engloutis dans les ténèbres de ce monde. Mais nos mains sont ce soir rendues fortes par la main du Tout-Puissant. Il nous a éloignés de la sombre vallée des larmes et de la mort et nous a triomphalement ramenés à la vie. Un passage de la mort à la vie que nous parcourons avec le Christ. La résurrection du Seigneur est aussi notre résurrection personnelle et individuelle. Sa victoire sur la mort est aussi notre victoire sur le péché. A partir de ce soir, tuons le poison de l'indifférence. Ne nous contentons pas de rester à l'écart et d'avoir l'air sans action et sans voix lorsque nos frères et sœurs souffrent. Le Christ n'était pas indifférent à nos peines. Il les a pris sur lui et est mort pour nous sauver. Puissions-nous aussi être comme le Christ aujourd'hui, apporter la lumière d'une nouvelle vie à ceux qui souffrent. Joyeuses Pâques à tous. Ensemble, vainquons triomphalement le péché et la mort.

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